Cacolac, c’est la petite bouteille fumée à l’étiquette vintage brune et jaune d’or qui a bercé notre enfance et celle de nos enfants. Son goût unique le hisse à la tête des réminiscences proustiennes que chaque génération souhaite partager avec la suivante, assurant longue vie à la marque. Mais quelle est donc l’histoire de cette réussite entrepreneuriale à la bordelaise ? Rencontre avec son dirigeant Christian Maviel, pour ce nouveau chapitre qui s’ouvre aux côtés de notre banque régionale.
La voie lactée
C’est dans l’après-guerre, en 1946, que les familles Lauseig et Lanneluc, chacune détentrice d’une laiterie à Pompignac et à La Benauge sur la rive droite de Bordeaux, décident de s’associer. En absorbant les collectes de lait alentours, la nouvelle unité créée stérilise, met en bouteille et développe une gamme de produits laitiers.
Lors d’un voyage aux Pays-Bas, Robert Lauseig et Albert Lanneluc découvrent un concept nouveau : le lait aromatisé. Ils tiennent quelque chose, leur instinct d’entrepreneur leur intime de rentrer avec cette idée dans leurs bagages. Mais ils ne se doutent pas qu’à ce moment-là s’amorce le début d’une success story qui perdure après trois générations. En 1954, le projet d’un lait parfumé au cacao a muri et prend corps, la marque Cacolac voit le jour.
« A l’époque, la France a la culture du lait frais et la recette d’un lait chocolaté est une véritable innovation. Les boissons prêtes à consommer sont alors rares, même si dans un autre registre, quelques soldats d’outre-Atlantique ont commencé à infiltrer « la bouteille à l’étiquette rouge et blanche » », indique Christian Maviel, PDG de Cacolac.
Ensuite, dans les années 60, au gré des opportunités du marché, le savoir-faire de la famille Lauseig se décline dans d’autres projets tels que Chambourcy Aquitaine, ou encore le rachat de l’activité fromage frais et yaourt par une société cherchant à s’implanter dans le grand Sud-Ouest.
L’aventure industrielle
Le retour aux sources, à la pure laiterie, date des années 70. C’est à ce moment-là que la société prend le nom de son produit phare : Cacolac et que l’aventure industrielle commence avec notamment l’installation d’une grande tour de stérilisation qui a marqué le paysage bordelais pendant plus de 30 ans. En 2000, l’entreprise déménage à Léognan et complète son offre.
Un court intermède extra-familial place même l’enseigne durant quelques années, entre les mains de deux associés, un industriel et un ancien de la distribution, pour compléter leur business plan basé sur une offre française de boissons et de barres de céréales.
« Cette vente en 2011 a été un véritable crève-cœur. Car aussi loin que remontent mes souvenirs, ils ont le parfum de Cacolac : des escapades sur ma voiture à pédale dès l’âge de 4 ans pour rejoindre mon père à l’usine, au job d’été à partir de 14 ans, jusqu’à l’école de commerce avec spécialisation agroalimentaire. Finalement, ça a toujours été ancré quelque part. Et l’opportunité du rachat en 2015 s’est imposé comme une évidence », confie Christian Maviel en digne héritier de la marque.
Cacolac est ainsi revenu dans le giron de sa famille fondatrice avec Christian Maviel aux commandes. A ses côtés, le fonds d’investissement Galia Gestion, filiale de la Caisse d’Epargne Aquitaine Poitou-Charentes, contribue à relancer la machine et depuis 2019, le dirigeant vole de ses propres ailes. L’entreprise compte aujourd’hui 52 employés pour un chiffre d’affaires de plus de 24 millions d’euros.
Le coup d’après
Au fil de ces évolutions, les modes de distribution de la boisson chocolatée changent eux aussi pour passer d’une consommation très orientée café-hôtel-restaurant à la vente aux particuliers en GMS, qui représente désormais près de 85% des volumes. Cacolac entre dans les foyers, en bouteilles, en canettes ou en briquettes pour des consommations plus nomades et la recette est rééquilibrée avec les codes nécessaires du moment : moins de sucre et de lactose.
Et 2020 sera l’année de réflexion pour passer à l’étape suivante. Les développements B to B et la sous-capacité de l’outil de production par rapport à la demande, ont tout naturellement conduit l’enseigne au lancement d’une nouvelle ligne.
« Avec une cinquantaine de millions d’emballages remplis par an, 11 000 m² de bâtiments industriels et une clientèle européenne grandissante, il y avait de quoi tabler sur la valorisation d’un savoir-faire désormais bien maitrisé : celui du remplissage, en bouteille verre comme en cannette alu. Et pour aller plus loin, l’outil historique augmenté de cette nouvelle ligne, a maintenant la capacité de répondre à des demandes qui ont longtemps fait jaser : le vin en canette à Bordeaux ! » complète Christian Maviel.
Le process de remplissage et de stérilisation est complètement différent pour une bouteille, une canette ou une briquette, c’est une expertise qui ne s’improvise pas. Pour cette activité, Christian Maviel a créé une entité commerciale dédiée ICT Drink (In Can We Trust) : un clin d’œil à ce concept émergeant qui fait figure de paradoxe bordelais. Pourtant des grands noms franchissent le Rubicon et deviennent clients de la solution mais pour une destination 100% à l’export, notamment en Amérique du Nord et du Sud, et également pour les pays scandinaves. Le contenant et la prestation de remplissage respectent le produit, ne l’altèrent pas. Pas de plus-value, pas de moins-value si le vin est bon au départ, il le reste : parole d’œnologues dont s’est entouré Christian Maviel avant de se lancer dans cette nouvelle aventure.
Avec cet objectif d’accroître sa capacité industrielle, Christian Maviel a fait appel à l’expertise d’un nouveau partenaire financier : la Caisse d’Epargne qui ne faisait pas partie du pôle historique des banques de Cacolac jusqu’à l’opération de rachat en 2015. Le projet de la nouvelle ligne a été accueilli avec enthousiasme par la banque régionale et cela a contribué à l’émulation qui a permis de concrétiser ce développement.
« Le retournement des précédents actionnaires n’a pas été un point bloquant, la vie d’une entreprise n’est pas linéaire et la réponse de la Caisse d’Epargne Aquitaine Poitou-Charentes a été immédiatement positive pour accompagner mon projet de rachat et son développement. Cette relation de confiance est très agréable et rassurante pour un chef d’entreprise »,
conclut Christian Maviel.
© Manza Studio
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